Un homme du milieu
Condamné à un an de prison ferme, à sa grande surprise et, il faut bien le dire, à l’étonnement général, pour avoir indûment perçu une modeste commission d’un million et demi de francs, « le terrible M.Pasqua », comme disait en plaisantant à moitié François Mitterrand, se dit bien entendu pur comme l’agneau qui vient de naître. Les prisons, nul ne l’ignore, sont peuplées de moutons, et justement l’ancien patron du redoutable S.A.C. n’a pas tardé à faire savoir que s’il devait tomber, il ne tomberait pas seul et que s’il devait être reconnu coupable, il parlerait. A bons entendeurs salut. Il n’y a pas plus dangereux qu’un animal blessé poussé dans ses derniers retranchements et de l’éléphant Charles Pasqua a la placidité pachydermique mais aussi la mémoire infaillible et la rancune implacable. Nommément mis en cause par leur vieil ami, M. Balladur ne se souvient de rien, M. Juppé ne voit pas ce qu’il veut dire et M. Chirac, comme d’habitude, n’a rien à déclarer. Il est vrai que M. de Villepin s’est porté garant de l’ancien chef de l’Etat. Mais à la lumière de l’affaire Clearstream, que vaut la parole de M. de Villepin ? Le comportement de M. Pasqua témoigne d’une conception clanique, pour ne pas dire mafieuse, de la vie publique et ne peut qu’alimenter le discrédit d’une classe politique qui ne connaît à l’omerta d’autre alternative que la vendetta. M. Pasqua quant à lui, toujours fidèle à la droite, ne s’est jamais éloigné du milieu. Dominique Jamet