Les caves du Panthéon

Publié le par admin

Les honneurs du Panthéon sont le tribut rituel que la patrie reconnaissante paie à ses grands hommes. Aux côtés de Hugo, de Zola, de Jaurès, de Schoelcher ou de Jean Moulin, un mort, si glorieux soit-il, ne saurait faire la fine bouche et se plaindre d’être en mauvaise compagnie. Cela dit, on peut très bien être un « grand homme » sans aspirer à partager pour l’éternité le discutable privilège de reposer sous les voûtes froides et dans les caveaux lugubres du monument néo-classique dédié par Soufflot à Sainte Geneviève. Imagine-t-on Chateaubriand ailleurs que sur l’ilot sauvage du Grand-Bé, balayé par les tempêtes et compissé par Sartre ? Valéry dans un cimetière qui ne serait pas marin ? Et le poète des Contemplations n’aurait-il pas préféré retrouver sous la terre et au bord du fleuve, à Villequier, l’ombre chère de sa Léopoldine ? On se réjouira que le président de la République, fût-il soupçonnable de quelque arrière-pensée récupératrice, ait songé à  honorer Albert Camus, juste parmi les hommes et parmi les philosophes. Mais Camus lui-même l’eût-il souhaité ? Sa famille, ses amis et ses admirateurs ne semblent pas persuadés que l’auteur de L’Etranger serait plus à sa  place dans le sous-sol parisien que sous le ciel méditerranéen, à l’ombre des cyprès de la Provence. Puisque l’histoire lui a refusé sa sépulture naturelle, qui était à Alger ou à Tipasa, qu’on le laisse du moins, rapatrié à Lourmarin, y dormir de son dernier soleil. Dominique Jamet

Publié dans Chroniques

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article